Bas de bilan : Anticipez pour présenter des comptes sains

Financement
05.11.2025
Magazine
Le bas de bilan regroupe les éléments d’actif et de passif circulant dont l’échéance est inférieure à un an : créances, dettes à court terme, trésorerie, stocks… Cet ensemble reflète la capacité d’une entreprise à financer son cycle d’exploitation. C’est pourquoi il est essentiel de suivre et d’optimiser ce bas de bilan afin d’anticiper ses besoins de liquidités et de maîtriser son besoin en fonds de roulement (BFR).
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À l’heure où une majorité des entreprises s’apprêtent à arrêter leurs comptes annuels, les experts-comptables comme les banquiers recommandent d’y prêter une attention régulière pour identifier d’éventuelles tensions et agir avant que celles-ci ne compromettent l’équilibre financier de la structure.

Le bas de bilan s’oppose au haut de bilan, qui regroupe l’ensemble des ressources et des emplois durables de l’entreprise (fonds propres, dettes à moyen et long terme, immobilisations incorporelles, corporelles et financières). Ce dernier traduit la stratégie financière de l’entreprise : investissements, emprunts, opérations sur le capital, etc.

 À l’inverse, le bas de bilan - présenté à la fin de l’arrêté des comptes annuels, comme son nom l’indique - rassemble les éléments à court terme que l’entreprise doit maîtriser pour calculer son besoin en fonds de roulement et assurer une gestion équilibrée de sa trésorerie. Un business plan solide doit ainsi intégrer la gestion des flux de trésorerie et l’optimisation de l’excédent disponible.

La lecture du bas de bilan offre donc une photographie précise de la situation de l’entreprise à la date de clôture de l’exercice comptable et sur le court terme. Elle permet d’alerter sur d’éventuels points de fragilité - conjoncturels ou structurels - et d’adopter rapidement les mesures nécessaires pour sécuriser les finances et ne pas mettre l’activité en danger.

Quels sont ces points de vigilance et comment agir ?

"Ces signes d’alerte concernent principalement les actifs circulants. Mais leur nature diffère selon qu’il s’agit d’un commerce de proximité ou d’une entreprise industrielle", précise Reynald Tannir, expert-comptable au sein du groupe Baker Tilly et président de l’Association des experts-comptables de la Sarthe.

Pour un commerçant réglé comptant par ses clients, le défi consiste principalement à maintenir un niveau de stock adapté à l’activité, en évitant la surabondance ou l’obsolescence des produits. L’enjeu est de trouver le juste équilibre entre une gestion maîtrisée des stocks et la nécessité de répondre aux attentes d’une clientèle habituée à une satisfaction immédiate, notamment via le commerce en ligne.

"Il est donc plus prudent de concentrer ses commandes sur les produits les plus populaires… à condition de ne perdre ni son identité, ni son originalité. Le chef d’entreprise doit conserver en permanence une bonne visibilité sur son stock pour identifier rapidement d’éventuelles problématiques", ajoute Olivier Cantin, président du comité des banques de la Fédération bancaire de la Sarthe et directeur départemental de la Caisse d’Épargne Bretagne Pays de la Loire.
"Dans cette logique, nous encourageons notamment les commerces dont l’activité varie significativement selon les saisons à clôturer leurs comptes pendant les périodes de creux, afin de présenter un besoin en fonds de roulement aussi faible que possible", poursuit Reynald Tannir, qui constate sur le terrain une tendance de plus en plus marquée à la réduction du volume des stocks, "tout en conservant un niveau de stocks de sécurité".

Pour les TPE et PME : surveiller les créances

En ce qui concerne les TPE et les PME, la vigilance doit porter avant tout sur le poste clients, et plus concrètement sur les créances à encaisser. Tout doit être mis en œuvre pour que les débiteurs s’acquittent de leur dette le plus rapidement possible, afin d’éviter de se retrouver soi-même en difficulté pour honorer ses propres charges.

La première recommandation consiste à relancer très régulièrement les clients à échéance fixe, en assurant un suivi rigoureux. Un conseil de bon sens, mais souvent difficile à appliquer pour un chef d’entreprise qui n’a pas les moyens de déléguer cette tâche.

"Si l’entrepreneur ne dispose pas du temps nécessaire pour relancer ses clients, il est possible de transférer cette mission à des prestataires extérieurs spécialisés", poursuit Reynald Tannir.
Il existe, en ce sens, plusieurs mécanismes adaptés selon les situations : affacturage, escompte, cession Dailly, carry back, ou encore prêt bancaire classique (voir encadré).

"Bien évidemment, malgré tous ces dispositifs, toutes les créances ne sont pas toujours recouvrables, lorsque le client se retrouve lui-même dans l’incapacité d’honorer sa dette. C’est pourquoi il peut être utile de faire appel à des assurances-crédits, quand l’entreprise en a les moyens", ajoute-t-il, en rappelant que toutes ces solutions ont un coût et qu’il faut, avec l’aide de son comptable et de son banquier, déterminer celles qui sont les mieux adaptées à chaque situation.

Anticiper pour préserver son outil de travail

"Avant tout, le chef d’entreprise doit observer très régulièrement l’évolution de ses stocks et de ses créances afin d’anticiper toute problématique financière et préserver son outil de travail", rappelle Olivier Cantin.

"C’est pourquoi nous conseillons à nos clients de solliciter au moins une fois par semestre leur conseiller bancaire pour échanger et prévenir toute dégradation. Nous sommes bien conscients que toute structure peut rencontrer des difficultés passagères, et notre rôle est d’accompagner l’entrepreneur pour éviter le dépôt de bilan."

Avec son banquier comme avec son expert-comptable, le chef d’entreprise peut ainsi identifier les leviers qui lui permettront d’alléger sa dette, de préserver un bas de bilan sain et de protéger durablement son activité.

Emmanuel Chevreul

Quels mécanismes pour contrôler et gérer les créances de son compte client ?

Comme le souligne Olivier Cantin, une première solution consiste à demander à sa banque un prêt, même temporaire, afin de redresser la situation financière.
D’autres outils peuvent être plus adaptés sur le court ou le moyen terme.
L’affacturage permet à une entreprise de confier la gestion de ses factures clients à un organisme spécialisé. Ce dernier avance immédiatement une partie des comptes clients (factures) à un tiers (appelé factor), déduction faite d’une commission, puis se charge de récupérer les sommes auprès des clients. Selon le contrat, il peut assumer le risque d’impayé.

D’autres techniques similaires existent, comme la cession Dailly ou l’escompte. Dans ces cas, la banque se charge du recouvrement : elle avance à l’entreprise le montant de la créance (déduction faite d’intérêts et de frais), en échange d’un bordereau Dailly ou d’un billet à ordre. Ce mécanisme, ponctuel et limité à une seule créance, laisse à l’entreprise la responsabilité du risque d’impayé.

On peut également citer le carry back. Ce dispositif fiscal permet à une entreprise de reporter une perte sur un exercice antérieur, afin de récupérer une partie de l’impôt déjà payé.

Il s’agit en quelque sorte d’un crédit d’impôt rétroactif, qui vient compenser une perte financière importante.