Bilan carbone en entreprise : un outil stratégique puissant
Réalisation d’un bilan carbone : pourquoi prendre de l’avance sur la législation ?
Depuis 2012, toutes les entreprises françaises de plus de 500 salariés sont dans l’obligation de réaliser un Bilan GES (gaz à effet de serre). Jusqu’à 2023, seules les émissions liées aux consommations d’énergies de l’entreprise étaient comptabilisées (Scopes 1 et 2).
En 2023, la réglementation a fait un bond en avant, en obligeant l’intégration du Scope 3 dans le calcul du Bilan GES. Cette extension de périmètre oblige les entreprises à comptabiliser, au-delà des émissions liées à leurs consommations d’énergie, les émissions réalisées en amont et en aval de leur activité :
- les émissions liées à la fabrication des produits achetés chez les fournisseurs ou à la transformation chez les sous-traitants ,
- les émissions liées à l’utilisation et à la fin de vie de leur produits chez les clients
Certaines entreprises ont choisi d’anticiper, et voient dans le Bilan GES une opportunité stratégique plutôt qu’une simple obligation législative. C’est le cas de Logisseo, une entreprise angevine de logistique de 35 salariés. Pas encore soumise au nouveau Bilan GES, elle a pourtant tout prévu pour réduire son empreinte carbone afin de répondre en avance aux exigences de ses parties prenantes.
Prendre le temps nécessaire pour faire sa transition, s’organiser en interne, adapter les relations avec ses fournisseurs et sous-traitants : les raisons de prendre un peu d’avance sur la législation en termes de Bilan GES sont nombreuses et propres à chaque organisation.
Mais au-delà de la législation, le Bilan GES est un outil stratégique. Il permet :
- d’évaluer son exposition à des taxes, des réglementations, des exigences des clients ou des collaborateurs, etc., soit d’évaluer les risques auxquels elle est exposée ,
- d’anticiper des sollicitations clients et donc de nouveaux besoins sur son marché, soit d’identifier les opportunités qu’elle pourrait trouver dans la décarbonation
Être en avance sur son marché
Depuis les Accords de Paris et la Stratégie Nationale Bas Carbone en 2015, les nouvelles lois françaises imposent le rythme de réduction des émissions (loi Elan, loi Energie-Climat puis loi Climat et Résilience, loi AGEC…).
Benoit Buffry, directeur des opérations de la société angevine Mobeetip, qui accompagne les entreprises dans la réalisation de leur Bilan GES, le confirme : “il y a des enjeux économiques et réglementaires très pragmatiques.” Ce sera d’autant plus le cas avec l’instauration du GES Scope 3, qui va obliger les entreprises à intégrer des indicateurs concernant les émissions provenant des produits et services de leurs fournisseurs et sous-traitants dans leur Bilan GES.
Stéphane Lecointe, chargé de mission décarbonation de l’industrie à l’ADEME des régions Bretagne et Pays de Loire, estime qu’avoir des indicateurs carbones en nette amélioration permet aujourd’hui de se démarquer d’un point de vue commercial, notamment en tant que fournisseur.
De fait, l’aspect économique de la mise en place d’un Bilan GES représente l’une des premières motivations des entreprises. Pour autant, la notion d’engagement écologique s’intègre de plus en plus dans leurs valeurs. A titre d’exemple, l’entreprise choletaise Bodet (920 salariés et 123,9 M€ de CA en 2022), spécialiste de la gestion du temps, vient de réaliser son premier Bilan GES. Sa responsable qualité et développement durable, Gaelle Leca, l’affirme : “pour nous, c’est la suite logique d’une démarche environnementale engagée depuis plus de dix ans.”
De son côté, Hélène Grellier considère que son engagement dans la réduction des émissions de carbone de Logisseo est stratégique, certes, mais également important d’un point de vue environnemental. Pour elle, “chaque petite graine semée chez mes salariés ou chez nos clients est positive.”
Adopter une stratégie à long terme
D’un point de vue pragmatique, les audits et bilans GES sont pour les entreprises un moyen concret d’objectiver leurs choix stratégiques pour les années à venir. Benoit Buffry le rappelle : “au départ, la méthodologie du bilan carbone est pensée comme un exercice d’analyse de vulnérabilité des organisations face au changement climatique”.
En bref, l’exercice pour l’entreprise est de se demander à quels risques est-elle exposée à court, moyen ou long terme, et en particulier son exposition à des énergies fossiles dont le prix et la disponibilité dépend des événements géopolitiques (pandémie, guerre en Ukraine) ou des aléas climatiques (sécheresses, inondations, tempêtes). Les événements survenus en France ces dernières années démontrent d’ailleurs une forte difficulté à évaluer les risques et leurs conséquences sur le système économique et industriel ! Il convient donc de s’y préparer au mieux, afin de s’y adapter rapidement en cas de nécessité. Gaelle Leca en est convaincue : “même si l’on ne connaît pas encore les retombées de ce travail de Bilan GES, il fait désormais partie de la stratégie à long terme du groupe Bodet et jouera certainement un rôle dans la pérennité de notre compétitivité”.
Cependant, selon Benoît Buffry, les entreprises volontaires de s’engager dans l’évaluation de leurs émissions de GES ont “besoin de s’appuyer sur des mesures régulières des données et sur une vision à long terme” pour quantifier et hiérarchiser les risques afin d’identifier et de mettre en œuvre des solutions concrètes.
Suivre un plan d’action précis pour réaliser des économies
A un Bilan GES s’adosse un plan stratégique de réduction des émissions. Des premières actions concrètes et rapides à mettre en place, aux transformations profondes du modèle et des produits ou services, cette stratégie s’installe sur le long terme. Hélène Grellier en témoigne : “depuis trois ans, à chaque nouveau bilan, nous affinons nos données et ajustons notre plan d’action en fonction.” En 2023, les émissions de GES de Logisseo ont d’ailleurs baissé de 2 %. Aujourd’hui, la structure met en œuvre différentes stratégies pour diminuer les émissions liées au transport.

De son côté, le groupe Bodet est encore au début du travail : “pour le moment, nous avons identifié les postes les plus émetteurs : ce sont les achats, les déplacements et l’énergie”, “il nous reste maintenant à élaborer notre feuille de route de transition pour 2024/2028”, détaille Gaëlle Leca.
Pas de doute : la mise en place d’un Bilan GES d’entreprise est donc bel et bien une démarche progressive, même si beaucoup de structures entament le travail par un questionnement sur leur niveau de consommation d’énergie. Stéphane Lecointe rappelle que les entreprises peuvent solliciter différents acteurs de l’accompagnement à la transition énergétique pour réaliser leur Bilan GES.
Transition écologique : bien se faire accompagner
En complément du soutien proposé par l’ADEME, les entreprises peuvent également faire appel à la CCI, des associations comme Orace ou l’ADECC* ou encore des entreprises spécialisées comme Mobeetip pour réaliser leur bilan carbone et commencer la transition écologique de leur entreprise !
Comment savoir par où commencer et passer à l'action tout en restant compétitif ? Les conseillers CCI sont là pour accompagner les entreprises du territoire, de la mise en place de premiers gestes accessibles jusqu'à l'intégration des enjeux climat et RSE au cœur de leur stratégie d'entreprise. La CCI propose une offre complète d’accompagnement d’entreprise pour réussir sa transition écologique pour leur permettre :
- d’évaluer les émissions de leur activité avec l'Eval Carbone Simplifiée,
- d’évaluer et réduire les impacts de leurs produits et services par l’écoconception avec Ecoprodduire,
- d’intégrer l’environnement dans le pilotage de l’entreprise avec l'Accélérateur DINAMIC+ parcours RSE Climat
Un Bilan GES complet peut être laborieux à mettre en œuvre : se faire accompagner est la clé d’une analyse efficace, pertinente et bien orientée.
La CCI continue d’accompagner la transition écologique des TPE/PME et des PMI sur tout le territoire français, via la mobilisation de dispositifs publics ou d’accords-cadres adaptés aux enjeux spécifiques de chaque structure.
Un article inspiré du magazine Anjou Eco n°74 - février 2024.